Visite du frère Timothy Radcliffe à Metz
Je vous invite à trouver ci-dessous les textes d'une part de la conférence prononcée le 1er mai à l'institution de La Salle, d'autre de l'homélie à l'occasion de la messe du 3 mai (dimanche des vocations).
Vous pouvez aussi trouver ces textes directement sur le site internet de l'Evêché de Metz à l'adresse:
http://catholique-metz.cef.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=225&Itemid=1
Visite du frère Timothy Radcliffe à Metz « Confiance, lève-toi, il t’appelle » (Marc 10.49) Metz, Institution de La Salle, 1er mai 2009 « Confiance, lève-toi, il t’appelle ». Bartimée est appelé à suivre Jésus. C’est le moment de sa vocation. Mais vous, avez-vous une vocation ? Oui, sinon vous n'existeriez pas. Une vocation signifie un appel et chaque chose existe parce que Dieu l’appelle toujours à l'existence, à chaque instant. Le Verbe dit : « Que la lumière soit » et la lumière fut. Dieu dit : « Que les lapins, les écureuils et les étoiles soient » et ils furent. Que Mgr Raffin existe, et il est ! Être un homme, c’est être appelé à partager le bonheur de Dieu lui-même. C’est avoir la vocation de partager la vie de la Trinité qui est le même amour parfait. Le 14 mars, au moment où je rédigeais cette conférence, on estimait que notre planète comptait 6.766.576.051 personnes. Chacune d'entre elles a vocation à entrer dans l'amour de Dieu. Sinon, elles n'existeraient pas. C'est la bonne nouvelle que nous devons partager avec nos contemporains. Notre époque est un temps d'anxiété aiguë. La crise financière signifie que des millions de personnes ont perdu leur emploi et même leur foyer. Beaucoup de jeunes n'ont aucune perspective d’avoir un jour un travail. Les personnes âgées se rendent compte que leur pension perd de sa valeur. Nous n'avons aucune idée de la durée de cette crise. Il y a également la menace de catastrophe écologique. Quand les jeunes d’aujourd’hui auront mon âge, le monde sera peut être dans un désordre épouvantable, fait de sécheresses, d'inondations et de grandes famines. Nous voyons aussi l’augmentation de la violence dans les quartiers déshérités et entre les gens de religions différentes. Dès lors il y a une profonde inquiétude à propos de l’avenir. Où allons-nous ? Chacun d’entre vous a la magnifique tâche de partager son espérance qui, dans la vocation humaine universelle, est de partager l'amour et le bonheur de Dieu. Nous ne savons pas comment nous y arriverons et le chemin au devant de nous est sombre, mais nous avons confiance en ceci : Dieu nous a fait pour nous épanouir avec Lui et nous le ferons. Tout cela est très beau, mais je rencontre beaucoup de jeunes qui essaient de comprendre comment ils devraient vivre cette vocation. Devraient-ils se marier, devenir prêtre ou religieux ? Devraient-ils travailler pour la justice ou entrer dans le monde des affaires ? Devraient-ils être artistes ou agriculteurs ? Chacun d'entre nous doit découvrir comment (nous allons) vivre cette vocation humaine pour partager l'amour de Dieu. Pour le dire très simplement, nous trouvons notre vocation particulière en découvrant comment aujourd’hui nous pouvons nous épanouir le mieux en personne aimante, ouverte à l'amour infini qu’est Dieu. Joseph Pieper définissait l'amour comme la joie profonde grâce à l'existence de l’autre. Nous leur disons : « Il est merveilleux que vous existiez ». Mais nous pouvons vivre cet amour de nombreuses manières. Nous pouvons nous donner à quelqu'un pour toujours dans le mariage, en déclarant « il est merveilleux que tu existes ». C'est un acte de gratitude envers le Créateur. Nous pouvons le faire en tant que religieux, voués au témoignage de la joie de Dieu auprès de ceux qui sont oubliés ou méprisés. Nous pouvons vivre cet amour comme des médecins ou des infirmières, incarnant l'amour de Dieu pour ces personnes malades au cœur de leur souffrance. Nous pouvons le faire comme artistes, enchanté par la beauté, image de la beauté de Dieu. Nous pouvons le faire aussi en travaillant pour le développement international, exprimant l'amour de Dieu pour le démuni. Ce sont toutes sortes de vocations et pas seulement des métiers, parce qu'elles expriment toutes de différentes façons la joie de Dieu en nous et dans toute la création. Et Pedro Arrupe s.j. disait : « rien n'est plus réalisable que de découvrir Dieu, c'est-à-dire de tomber amoureux d'une façon tout à fait absolue, finale. Ce dont tu es amoureux, ce qui saisit ton imagination, transformera tout. Cela décidera ce qui te sortira du lit le matin, ce que tu feras de tes soirées, à quoi tu passeras tes weekends, ce que tu liras, ce que tu connais, ce qui brise ton cœur et ce qui te stupéfait avec joie et gratitude. Tombe amoureux, reste amoureux et cela décidera de tout ». Ainsi, découvrir votre vocation, c’est trouver comment vous êtes créés pour aimer au mieux. Chacun d'entre nous a besoin de l'environnement approprié pour déployer sa propre manière d’aimer. C’est comme les plantes. Certaines ont besoin d'un sol acide et d'une protection contre le vent; d'autres ont besoin d'un sol alcalin sinon elles meurent. Certaines plantes s’épanouissent dans la forêt tropicale humide et d'autres dans le désert. Nous devons découvrir quel genre d’environnement est nécessaire pour faire fleurir notre capacité d’aimer. Chaque vocation a sa place dans l'écologie de l’amour. Aucune n'est meilleure que l’autre. Mais nous devons savoir laquelle est la nôtre. Ce Pour de nombreuses personnes, la question la plus difficile est de savoir s’ils sont appelés à se marier ou bien à choisir le célibat en tant que prêtre ou religieux. Nous avons besoin des deux vocations puisque chacune exprime quelque chose du mystère de l'amour de Dieu. L'amour de Dieu est à la fois particulier et universel. Dieu m'aime dans ce que j’ai d’unique. C'est pourquoi j'existe comme un individu particulier. Dieu me dit : « Timothy, c’est merveilleux que tu existes ». Je ne sais pas si mes frères sont toujours d’accord ! Julien de Norwich, un mystique anglais du quatorzième siècle, affirmait que Dieu ne pouvait pas être fâché contre nous, sans quoi nous cesserions immédiatement d'exister. Et cette dimension de l'amour de Dieu trouve une expression éclatante dans le mariage, dans lequel deux personnes s’offrent l'une à l'autre pour leur plus grand bonheur. Leur relation est un sacrement de la joie de Dieu en chacun d'entre nous. Ils sont le témoignage de la parole de Dieu pour les autres : « C’est merveilleux que tu existes. » Mais l'amour de Dieu est aussi universel. Selon les mots Selon les mots de Dante, Dieu est «l'amour qui déplace le soleil et les autres étoiles.» Il englobe tout. Et la vocation sacerdotale ou religieuse doit être un signe de ce grand amour sans limite. Pour nous, ces deux dimensions de l'amour ne peuvent pas être vécues de la même manière en même temps. Si j'aime passionnément Elisabeth et me donne à elle pour toujours, je ne peux pas à la fois aimer Margaret de la même manière. Mon amour pour Elisabeth est un signe de l'amour particulier de Dieu précisément par sa radicalité pour une seule personne. Elle est celle pour qui je suis fait, le soleil autour duquel la planète Timothy Cela ne signifie pas que les personnes mariées s'aimeront juste l’une l’autre, dans une relation passionnée et introvertie qui n'a aucune place pour personne d'autre. D.H. Lawrence a appelé un tel amour narcissique, « l’égoïsme à deux ». En Inde, on raconte l’histoire de deux épouses de Brahmanes qui obéissaient aux commandements de donner l'aumône en s’échangeant des cadeaux similaires pour ainsi ne rien perdre. Sois prévenu : elles ont été réincarnées sous la forme de sources empoisonnées ! L'amour réciproque dans un couple est le terreau dans lequel l'amour conjugal est enraciné, mais ils doivent s'ouvrir à d'autres, sans quoi leur amour sera stérile. D'habitude cela se produit avec l'arrivée des enfants. Le père peut être choqué de constater qu'il n'est plus le centre exclusif de l'amour de sa femme. La vie de celle-ci doit s’organiser autour d'un autre. Et doit venir le temps où ils doivent aimer assez cet enfant pour le laisser partir et trouver un partenaire pour la vie. Le Une famille chrétienne existe pour nous laisser partir. Joseph et Marie ont appris ce chemin difficile lorsqu’ils ont perdu Jésus pendant trois jours. L'enfant leur dit : «Pourquoi donc me cherchiez-vous ? Ne saviez vous pas qu’il me faut être dans la maison de mon Père ? « (Luc 2,49). Ainsi le terreau dans lequel l’amour conjugal doit être enraciné, est celui d'une relation passionnée pour une autre personne. Mais la fleur s’épanouit en s'ouvrant à d'autres. Nos amours s’ouvrent vers l'extérieur aux enfants et amis. En fait aucune relation fondée juste sur deux personnes se regardant dans les yeux ne pourrait durer longtemps. Je connais une sœur dominicaine venant d’une famille de onze enfants, famille catholique typique se reproduisant comme des lapins. Chaque année, ils ont une méga-fête de Noël pour toute la grande tribu, rassemblant une centaine de personnes. Une année, la soeur Pat Il en est de même dans la vie religieuse et le sacerdoce. Le terreau dans lequel notre vocation d’aimer est enracinée est celui d'un amour ample, y compris pour ceux que nous ne connaissons pas encore. Cela implique un réel sacrifice dans lequel on renonce à la joie de l’amour dans lequel deux personnes se donnent l'un à l'autre pour toujours. Nous sommes appelés à être les témoins de l'amour immense de Dieu qui n’exclut personne. Il s’agit juste d’une vocation d’aimer autant que celle des personnes mariées: mais plus particulièrement pour ceux que personne n'aime, ceux qui sont oubliés ou méprisés. Quand j'étais en Angola pendant la guerre civile, j'ai eu une rencontre avec les novices des frères et sœurs dominicains. Ils ont été coupés de leur famille et de ceux qu'ils aimaient à cause du conflit. Devaient-ils quitter leur communauté religieuse et rentrer à la maison pour prendre soin de leur famille ou plutôt rester dans l'Ordre ? Pour les Africains qui ont un sens profond de la famille, c’étaient un terrible dilemme. Mais une jeune soeur s'est levée et a dit : « Laissez les morts enterrer les morts; nous devons rester pour annoncer la Bonne Nouvelle Nos communautés sont les signes de l'amour immense de Dieu quand nous vivons avec des frères et des sœurs que nous n'avons pas choisis et avec qui nous pouvons être en désaccord au sujet de la religion, de la politique et même de la nourriture ! Ils peuvent parfois nous rendre cinglés. Un moine racontait qu'il avait dû écouter un autre moine assis à côté de lui buvant son thé à grand bruit pendant vingt ans ! Rejoignez les Dominicains et vous pourrez vous asseoir où vous voulez ! Notre vie commune est vraiment un signe du Royaume précisément à cause de nos différences. Une communauté de gens de même mentalité n'est pas un signe du Royaume. C'est juste un signe d’elle-même. Le signe le plus fort de cette diversité que j’ai vu, c’était lors de mes visites au Rwanda et au Burundi pendant les années difficiles de la guerre civile et du génocide. Les frères et les soeurs des tribus en guerre devaient vivre, manger et prier ensemble. C'est un témoignage de l'amour immense de Dieu. C'était douloureux tout en étant un signe d’espérance. La tentation de notre société est de faire communauté seulement avec des gens de même mentalité, qui partagent nos avis, nos préjugés et notre sang. Les conservateurs s'associent avec des conservateurs et les progressistes avec des progressistes. Les vieillards sont envoyés dans les maisons de retraite, les adolescents passent leur temps avec des adolescents et ainsi de suite. Mme Thatcher avait l'habitude de demander aux gens : « Est-il des nôtres ? » Nous devrions rejeter cette tentation. Au lieu d'être homogène, comme un bloc de glace vanille, nous devrions ressembler à un bon ragout, dans lequel ce sont les différents goûts qui donnent la saveur. Dans de nombreux pays, l'Église est profondément polarisée entre ceux qu’on appelle conservateurs et ceux qu’on appelle progressistes. Il y a une véritable hostilité et une colère à l’intérieur de notre Église envers ceux de l'autre bord. Le rôle prophétique des religieux est de tendre la main en toute amitié au-delà des divisions. L'opposition de la gauche et la droite, des traditionalistes et des progressistes, provient du dix-huitième siècle, le siècle des Lumières, et est étrangère au catholicisme. Nous sommes tous nécessairement à la fois conservateurs, les yeux fixés sur les évangiles et la tradition et, en même temps progressistes, espérant la venue du Royaume. Un des défis est la transmission d’une génération à l’autre. Ma communauté à Oxford comprend au moins quatre générations. Il y a un vieux frère âgé de 83 ans, qui a été formé dans la tradition classique d'avant le Concile Vatican II avec la conception préconciliaire de la vie religieuse. Il y en a quatre ou cinq de ma génération, qui ont vécu dans les années exaltantes et tumultueuses de l’après-Concile. Il y a un plus grand groupe de frères qui vient de ce qui est parfois appelé « la génération Jean-Paul II la « Génération Y Ce ne sont pas seulement les religieux et les prêtres qui peuvent être appelés à être témoins de l'amour universel de Dieu. C'est la vocation de célibataire comme Jean Vanier, qui a co-fondé le mouvement L'Arche, avec Thomas Philippe, un Dominicain français. Jean a grandi dans un monde privilégié. Son père était ambassadeur en France avant de devenir Gouverneur général du Canada. Jean a fait un brillant doctorat en philosophie et a enseigné à l'Université de Toronto. Puis il a rencontré Raphaël et Philippe, deux jeunes hommes avec des handicaps mentaux. Il a établi sa première communauté avec eux et cela a transformé sa vie. Il a écrit : « Ils m'ont appelé à prendre un autre chemin, le chemin de la tendresse, de la compassion et de la communion. Ils Donc certains d'entre nous sont appelés à être les signes de l'amour immense et universel de Dieu. Mais personne ne peut échapper au défi d'aimer certaines personnes. La vocation des prêtres, des religieux et des personnes comme Jean, est enracinée dans le terreau de cet amour généreux et ouvert. C'est sa fondation en nous. Mais si nous n’apprenons pas à aimer profondément certaines personnes, notre amour peut devenir froid et vide. Il s’enfuirait en courant loin des complexités de la relation et ce serait de la lâcheté. Saint Aelred Bede Jarrett, qui était le Provincial dominicain de la Province anglaise il y a soixante dix ans, a reçu une lettre d'un jeune novice bénédictin, Hubert van Zeller, qui pensait devoir quitter la vie religieuse parce qu'il était tombé amoureux de quelqu'un appelé P. Mais Bede a vigoureusement marqué son désaccord: « je suis heureux [que tu sois tombé amoureux de P] parce que je pense que ta tentation était toujours celle du Puritanisme, de l’étroitesse et d’une certaine inhumanité. Ta tendance était presque de nier la sanctification de la matière. Tu la vie. Je Toutes les vocations aspirent donc au mystère de l'amour de Dieu, à la fois particulier et universel, mais elles sont aussi enracinées dans des sols différents. Nous devons grandir là où nous sommes semés. Si on est enraciné dans le terreau de l’amour passionné pour une autre personne, c'est donc là qu’il faut s’épanouir. Viendra le temps où il faudra élargir à un amour plus universel. Il s’agira d’aimer d'autres et de se réjouir de leur existence. Mais si cela sape la relation fondamentale, sur laquelle ta vie est fondée, à un point tel que tu t’éloignes de l'autre, alors survient le risque de ne pas avoir de racines du tout et de mourir. De même, le prêtre ou religieux arrivera, j'espère, à vraiment aimer des personnes individuelles et à leur dire « Il est merveilleux que tu existes. » Mais si cela sape notre manière particulière d’aimer, alors nous risquons de nous mettre dans de beaux draps! A peine ordonné, je suis tombé très amoureux de quelqu'un qui m'aimait aussi. C’était quelqu'un que je pouvais épouser et avec qui je pouvais avoir des enfants. Ma vie a été mise sens dessus dessous ! Avais-je fait une erreur ? Je venais juste de faire mes voeux quelques années auparavant et m'étais engagé dans l'Ordre jusqu'à la mort. Voilà Mais comment pouvons-nous savoir quelle est notre vocation ? Ce sera toujours difficile de le découvrir, parce que nous sommes tous appelés à aimer à la fois en particulier et plus largement. On espère que celui qui est appelé au mariage se sentira appelé à la liberté de donner sa vie avec une folle générosité envers l'oublié. Et si quelqu'un qui se sent appelé à la vie religieuse, n'a pas aussi éprouvé le désir de se donner lui-même à quelqu'un dans une relation engagée et passionnée, alors on peut se demander s’il n’est pas en train de fuir quelque chose. Tous nous avons envie de l'immensité de l'amour de Dieu, qui n'exclut personne et le désir de faire d’un autre le centre de notre vie et dire : « c'est merveilleux que tu existes ». Nous découvrons lentement comment nous pouvons nous épanouir au mieux. Nous tombons peut-être amoureux, mais fréquentons aussi des communautés religieuses. Nous mettons en terre une racine provisoire dans cette relation alcaline et ensuite une autre dans ce monastère acide! Nous continuons à chercher jusqu'à ce que nous trouvions le sol dans lequel nos coeurs peuvent se développer et nous pouvons respirer profondément. Une fois, j'ai rencontré un homme qui expliquait qu’après avoir été fiancé, il avait rompu et il était entré au séminaire. Il avait ensuite quitté celui-ci et s'était fiancé à nouveau. Puis il avait rompu et à ce moment, il pensait devenir Dominicain. Je lui ai dit qu'il durerait six mois ou bien qu’il pourrait avoir trouvé sa maison pour toujours! Il est toujours avec nous, trente-deux ans plus tard ! Et nous devons aussi garder nos oreilles ouvertes à la Parole. Au Une grande question quand nous considérons notre vocation est de savoir si nous la supporterons pendant des années. Je peux aimer Elisabeth, mais est-ce que je veux être avec elle pour toujours ? Je peux aimer les Dominicains, mais puis-je faire des vœux jusqu'à la mort ? Il y a quelques années, s’est déroulé à Rome un Congrès à propos de la vie religieuse. Des participants se demandaient si l'engagement jusqu'à la mort était toujours un élément nécessaire de la vie religieuse. Je suis tout à fait en faveur de l'ouverture de nos communautés à tous les types d'amis, d’associés et de collaborateurs, mais au centre de la vie religieuse et du mariage, il doit y avoir le geste courageux de donner nos vies jusqu'à la mort. C'est Un jour, un frère âgé du nom de John, confronté à la mort, me disait qu'il était sur le point d'accomplir une grande ambition, celle de mourir en Dominicain. Sur le moment, je ne pensais pas que c'était vraiment une ambition remarquable, mais cela en est devenu une pour moi, à laquelle je tiens beaucoup. Il avait fait cadeau de sa vie à l'Ordre et, malgré les déviations sur sa route, il ne l'avait pas reprise. Il était un signe d’espérance pour les jeunes. On m'a dit mille fois qu’on ne peut pas attendre d’un jeune qu’il prenne cet engagement définitif, jusqu'à la mort. Les la maison. L'Américain Mais c'est précisément parce que nous vivons dans une culture d'engagements à court terme que des voeux jusqu'à la mort sont un magnifique signe d’espérance. C'est un geste fou, mais nous devons demander aux jeunes de faire des gestes courageux et fous, et croire qu'avec la grâce de Dieu, ils peuvent en vivre. Récemment quatre jeunes hommes ont fait leur profession solennelle dans ma Province anglaise. Ils sont tous intelligents, énergiques et avec des diplômes universitaires. Chacun d'entre eux aurait pu s’épanouir dans le monde, avoir une vie conjugale heureuse et gagner beaucoup d'argent. Quelques jeunes femmes ont dit :« Quel gâchis ! Ils auraient pu faire un mariage heureux … peut-être avec moi ». Je ne suis pas sûr que quelqu'un ai dit cela quand j'ai fait ma profession ! Pour eux, se donner à l'Ordre jusqu'à la mort évoque notre espérance pour chaque être humain. N'importe lequel d'entre nous est-il assez fort pour prendre cet engagement ? Non ! Sauf si nous découvrons le chemin où nous sommes appelés pour aimer, le terreau dans lequel nous sommes le mieux enracinés, alors nous accueillerons Dieu dans nos vies, et c'est Dieu qui nous portera. Si je vis ma vie comme prêtre ou religieux avec amour et générosité, me laissant toucher par d'autres, alors la grâce de Dieu me donnera de la force. Bien la mort. Car Ceci exige un courage formidable. Notre société est timide et a peur du risque, c’est pourquoi il y a une obsession de santé et de sécurité. Nous avons peur d’être trompés ou blessés. Dans l'Église aussi, il y a bien trop de crainte. Nous pouvons même avoir peur du risque d'aimer et d’être aimés. C'est toujours une aventure dans l'inconnu. Quand nous faisons le serment de notre amour pour quelqu'un devant l'autel, nous ne savons pas ce qui nous attend. Quand nous nous donnons à un Ordre religieux, nous ne savons pas quelles choses folles nos frères ou sœurs pourraient nous demander. Ils pourraient nous envoyer en Chine ou nous élire Maître de l'Ordre s'ils sont vraiment fous ! Mais c'est le courage des martyrs qui a converti l'Empire romain et le courage sera aussi notre meilleur témoignage. Il y avait un homme qui roulait le long du sommet d'une falaise, tout en se demandant si Dieu existe ou non. En fait, il a été si distrait qu'il a roulé par-dessus le bord de la falaise et a été éjecté hors de sa voiture. Comme il tombait, il s'est accroché à la branche d'un arbre. Soudainement la question de la foi est devenue urgente et il a donc crié : « Il y a quelqu'un ? » Finalement une voix répondit : « oui, je suis là. Fais-moi confiance. Lâche la branche, laisse-toi tomber et je te rattraperai. » Alors l’homme a réfléchi quelques instants et puis il a crié de nouveau : « Il y a quelqu'un d’autre ? » Alors, sois courageux. « Confiance, lève-toi, il t’appelle ». Trouve le terreau dans lequel tu pourras t’épanouir comme une personne aimante. Et mets ta confiance en Dieu. Fr Timothy Radcliffe, op Metz, Institution de La Salle, 1er mai 2009 4ème dimanche de Pâques – Journée Mondiale de Prière pour les Vocations Cathédrale de Metz 3 mai 2009 Les temps sont durs pour des millions de gens. Beaucoup ont perdu leur emploi. D’autres se rendent compte que leur maison vaut beaucoup moins que ce qu’ils espéraient. Les personnes âgées craignent que leur retraite ne suffise pas. Surtout, je pense aux jeunes qui se demandent quel genre d’avenir s’ouvre devant eux. Auront-ils jamais un emploi ? Qu’est-ce que, nous, l’Eglise, pouvons leur offrir ? Après la Résurrection, Saint Pierre marchait dans Jérusalem et il passa devant un mendiant qui ne pouvait pas marcher et qui demandait l’aumône. Pierre répondit, « Je n’ai ni argent, ni or, mais je te donne ce que j’ai. Au nom de Jésus Christ de Nazareth, marche. » Et il le saisit par la main droite et le fit se lever (Actes 3.6) Comme la première lecture d’aujourd’hui nous le dit, il agit ainsi par la puissance de la Résurrection. Le Père la Résurrection. Et Aujourd’hui, confrontés à toutes les souffrances de la récession, nous devons offrir aux personnes plus que de l’argent. Nous devons aider les personnes à se relever pour qu’elles puissent se tenir debout avec dignité. La récession est due, en partie, à une culture qui considère avant tout la personne d’un point de vue économique. Notre importance réside dans ce que nous gagnons. Notre dignité réside dans le fait que nous sommes des consommateurs et que nous pouvons acheter des choses. Or, en tant que Chrétiens, nous sommes appelés à une dignité plus profonde puisque nous sommes enfants de Dieu. Il est vrai que les personnes ont besoin de soutien financier. Je travaille avec Caritas Internationalis, qui est l’organisation non gouvernementale officielle de l’Eglise Catholique. Avec la Croix Rouge L’un des trafics actuels les plus importants est la prostitution des femmes. On fait croire à des dizaines de milliers d’innocentes jeunes femmes qu’elles peuvent trouver un bon emploi en Occident ; elles tombent alors dans les mains de bandes criminelles qui les mettent en esclavage, et les utilisent pour la prostitution. Ces Et quelles sont les personnes qui sont les plus efficaces pour combattre ce cruel trafic ? Ce sont souvent des religieuses. Notre société véhicule l’image des sœurs comme étant de vieilles et pieuses femmes, enfermées dans leur couvent. Mais ce sont ces sœurs qui disent à ces femmes : « Je n’ai ni argent, ni or, mais je te donne ce que j’ai. Au nom de Jésus Christ de Nazareth, marche. » Elles les aident à recouvrer leur dignité. Elles ont un réseau qui aide ces jeunes femmes à chaque étape de leur souffrance. Sœur Bonetti, en Italie, a déclaré : « Nous avons un réseau bien plus puissant que Al-Qaïda. » Il existe une coopération extraordinaire entre les sœurs italiennes et les religieuses du Nigéria, d’où sont issues beaucoup de prostituées. Au Nigéria, les sœurs mettent en garde les jeunes femmes de ce qui les attend, et en Italie, elles les aident à échapper aux griffes des bandes criminelles, leur offrent un toit et une aide médicale, et les aident à retourner dans leur pays. Tout ceci au nom du Seigneur Ressuscité qui nous fait nous tenir debout. Et que dire à propos des jeunes ? Voici un petit exemple. Nous avons, attachés à notre communauté dominicaine à Oxford, une organisation qui s’appelle « International Young Leaders Network » (« réseau international pour les jeunes »). Ce réseau aide les jeunes qui se tiennent debout et deviennent des dirigeants dans l’Eglise et dans la société. Je Dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus nous dit qu’il est le Bon Berger. Il appelle les moutons à sortir des leurs abris protecteurs pour paitre dans de larges pâturages. Ils entendent sa voix et ils lui font confiance. Ils ont le courage de sortir dans le monde. Ils savent qu’il n’est pas comme les bergers qui travaillent pour de l’argent. Nous sommes tous appelés à être des bons bergers les unes pour les autres, prêtres et laïcs, hommes et femmes. Si nous nous aidons les uns les autres à nous lever, alors nous nous tiendrons debout comme enfants de Dieu, et nous affronterons l’avenir avec courage. Fr Timothy Radcliffe, op